Argent liquide, titres de société, bien immobilier… Dès lors que vous faites une donation à une personne tierce à l’international, vous devez régler à l’administration fiscale des droits dits de donation. Voici les conditions de fiscalité des donations internationales à respecter.
En vivant à l’étranger, vous avez un statut particulier en cas de donation. Tout va dépendre de si vous êtes le donateur ou le bénéficiaire, et du lieu de résidence des deux. Cela peut également varier selon l’existence de convention fiscale qui fixe un cadre. Elles sont peu nombreuses : les notaires de France en dénombrent seulement sept qui traitent la question de la donation. Il s’agit de l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie, les Etats-Unis, la Guinée, la Suède, la Nouvelle-Calédonie et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Pour les autres pays se sont, par défaut, les règles françaises qui s’appliquent. Ce sont elles que nous exposons dans ce guide. Dans les tous cas de figure, le bénéficiaire doit remplir les formulaires 2735 ou 2734, selon chaque situation personnelle, et ce dans le mois qui suit la conclusion du contrat devant notaire de la donation.
Lorsque vous recevez une donation d’un résident français pendant que vous vivez à l’étranger, ce sont les règles en vigueur en France qui s’appliquent. De même, si vous vivez à l’étranger et que vous procédez à une donation à un bénéficiaire vivant en France, ce sont les règles françaises qu’il faut suivre. Bien qu’il existe plusieurs types de donation, il n’y a qu’un seul régime fiscal. Et toutes profitent d’un abattement qui s’applique sur une période cumulée de 15 ans. En clair, lorsque l’on donne à l’un de ses enfants, la somme en question ou la valeur estimée de la donation qui ne dépasse pas 100 000 euros sur une période cumulative de 15 ans, échappe à l’impôt. Ce qui permet soit de donner tout en une seule fois et ensuite d’attendre 15 ans avant de réitérer l’opération ; soit le don est pour un montant inférieur à ce plafond, et en ce cas il est possible de faire une ou plusieurs donations échelonnées.
L’abattement sur les donations
Exemple : en année 1, on vous donne une sculpture d’une valeur de 10 000 euros. Sous 15 ans, des donations sont encore possibles dans la limite de 90 000 euros. Si ce n’est pas le cas, dans 15 ans, l’abattement sera de nouveau de 100 000 euros au maximum. Si pendant la période, disons 7 ans après la première donation, un nouveau don est effectué pour un montant de 50 000 euros. Ici, il restera 40 000 euros de donation non imposée à utiliser pendant 8 ans pour le bénéfice de la même personne. Après cette durée, le montant de la première donation sera reconstitué, permettant alors de donner non plus 40 000 mais 50 000 euros sans être taxé, et ce pendant une nouvelle période de 7 ans. Ce qui correspond à la durée restante pour reconstituer les 50 000 euros de la seconde donation.
Ce principe vaut aussi pour le conjoint marié ou pacsé avec un plafond de 80 724 euros sur 15 ans, pour les frères et soeurs dans la limite de 15 392 euros sur 15 ans, ou encore les neveux et nièces avec un plafond de 7 967 euros toujours sur 15 ans. Si les petits-enfants, sont privilégiés, le plafond au-delà duquel la donation est imposable se situe à 31 865 euros, là encore sur 15 ans. Notez que pour une personne handicapée, qu’elle soit une héritière directe ou indirecte, l’abattement fiscal est de 159 325 euros et peut se cumuler avec tout autre abattement, y compris ceux évoqués un peu plus haut.
Le barème des droits de donations
Dès lors qu’une donation est imposable, l’administration fiscale applique un barème qui va dépendre de la valeur de la donation mais aussi du profil du bénéficiaire. Ainsi, pour les enfants, les taux d’imposition sur les donations sont les suivants après la déduction de l’abattement :
Montant de la donation après déduction de l’abattement | Taux d’imposition |
jusqu’à 8 072 euros | 5% |
de 8 072 à 12 109 euros | 10% |
de 12 110 à 15 392 euros | 15% |
de 15 393 à 552 324 euros | 20% |
de 552 325 à 902 838 euros | 30% |
de 902 839 à 1 805 677 euros | 40% |
au-delà de 1 805 677 euros | 45% |
Source : Ministère des comptes publics – Janvier 2020
Pour les donations faites aux frères et soeurs, le taux d’imposition est de 35% pour un montant inférieur à 24 430 euros après application de l’abattement. Au-delà, ce taux passe à 45%. Pour les autres héritiers avec un lien de parenté jusqu’au 4e degré, le taux d’imposition est de 55% sur le montant donné, déduit de l’abattement. Au-delà du 4e degré, le taux appliqué est de 60%.
Bien gérer les droits de tous les héritiers
La donation intervient forcément pendant le vivant du donateur, sinon il s’agit d’un legs. Elle permet de transmettre ses biens de façon anticipée. Ce qui explique la présence d’un régime fiscal spécifique. De la sorte, cela permet in fine de régler des droits fiscaux moins élevés qu’en cas de successions. Puisque le calcul porte sur la valeur au moment de la donation, et non à la date du décès du propriétaire-donateur. Si le ou les biens voient leur valeur se bonifier, cela est sans conséquence pour le bénéficiaire de la donation, dite donation-partage. Et par ailleurs, cette dernière permet au donateur de s’assurer que son geste respecte les droits de tous ses héritiers, ses enfants en l’occurrence, et que ses donations ne seront pas contestées à sa disparition. Ceci vaut pour un bien immobilier mais aussi pour une exploitation agricole ou des parts sociales d’une entreprise.
Ensuite, donner permet d’accroître des droits de propriété et d’usage sans devoir alourdir la note fiscale. C’est le cas de la donation entre époux ou dite aussi donation au dernier vivant. Elle offre la possibilité à l’époux survivant de recevoir la totalité de l’usufruit des biens du défunt, et donc pas seulement continuer à habiter dans la résidence principale acquise par le couple. Dans le même registre, il y a la donation avec réserve d’usufruit. Ici, les droits de donation ne portent que sur la valeur de la nue-propriété, puisque le donateur conserve l’usage et les fruits du bien, l’usufruit. A son décès, le ou les bénéficiaires récupèrent l’usufruit, et donc acquièrent la pleine propriété du bien sans avoir à payer de droits de donation ou de succession supplémentaires. C’est vrai pour toute personne qui vit en France, c’est vrai pour toute personne non-résidente dans un pays sans convention fiscale sur les donations.
Les pièges du don manuel et des parts sociales
Toutes les donations ne sont pas systématiquement taxées. C’est le cas des dons manuels, c’est-à-dire des biens mobiliers donnés de la main à la main, sans que les services fiscaux en aient connaissance. Ce vaut autant pour deux personnes vivant en France, qui si elles vivent à l’étranger. Peu importe, cela peut causer des conflits entre héritiers au moment de la succession. Ainsi, au moment de répartir le patrimoine du défunt, le don manuel peut se retourner contre son bénéficiaire : si les héritiers disposent des preuves des avantages reçus, à leur détriment, les biens ou les sommes concernés seront revalorisés et pris en compte dans la répartition de la succession. Si le bénéficiaire a effectivement reçu plus que ce qu’il n’aurait dû au regard de la réserve héréditaire, qui fixe qui reçoit quoi selon le lien de parenté, il devra dédommager tous les héritiers lésés pour rétablir la juste répartition du patrimoine. Et il aura aussi à s’acquitter des droits fiscaux attachés. La bonne affaire du départ peut donc se finir en un puits sans fond. Il s’ajoute un cas particulier : le don manuel a lieu à l’étranger entre deux non-résidents, mais la somme reçue sert à acheter un bien en France. Il convient de déclarer le don au fisc français. Car si le non-résident revient en France pour habiter le bien, il sera redevable aux droits de mutation à titre gratuit, même si la donation a eu lieu hors de France.
On retrouve la même difficulté de gestion avec la donation de parts sociales. Ces dernières vont être revalorisées au moment de la succession. Et le bénéficiaire va devoir, comme pour le don manuel, dédommager les autres héritiers, afin de respecter les droits de chacun sur le patrimoine du défunt. Cette issue n’est pas inéluctable. Il existe plusieurs dispositifs qui évitent ce piège. Il y a par exemple, le Pacte Dutreil qui permet de profiter d’une exonération des droits de mutation à hauteur de 75 % de la valeur des titres ou de l’entreprise. Il est aussi possible d’appliquer le principe de la donation-cession. Il s’agit de donner aux héritiers les parts de l’entreprise, qu’ils pourront vendre ensuite. Ici, il faut toujours veiller à respecter les droits de chaque héritier. Mais l’avantage tient en ce que l’imposition sur la plus-value en raison de la cession des parts, porte sur la différence entre la valeur au moment de la donation et celle de la cession. Vous n’économisez pas les droits de donation, mais réduisez significativement le montant de la taxe sur la cession sur les titres mobiliers, qui est de 30 %, prélèvements sociaux inclus.
Les donations entre non-résidents français
Si le donateur et le bénéficiaire n’habitent plus en France, les règles françaises présentées ci-dessus s’appliquent pour les seuls biens mobiliers et immobiliers des non-résidents situés en France. Pour cela, vous devez ne plus avoir de domicile fiscal en France à la date de l’opération, ou ne plus en avoir pendant au moins six ans au cours des dix dernières années. Si vous ne remplissez pas cette condition, alors les règles fiscales portent sur l’ensemble de la donation, que les biens concernés soient situés en France ou à l’étranger.