Le fonds de commerce est une composante de l’entreprise : l’ensemble des actifs corporels et incorporels utilisés pour l’exploitation de l’activité commerciale, industrielle ou tertiaire. Concrètement, selon la nature des activités de l’entreprise, il inclut : la clientèle, l’achalandage, les salariés, la notoriété, le nom commercial, le nom d’enseigne, le droit au bail en cas de location des locaux, les brevets, licences et autres droits de propriété intellectuelle, les contrats d’assurance, le mobilier, le matériel et outillage, l’agencement des lieux, les stocks de marchandises ou matières premières, etc. De manière générale, il s’agit de tout élément nécessaire ou indispensable pour pouvoir exercer. Ce qui inclut aussi les diverses autorisations administratives comme le contrat de franchise avec un réseau, le contrat pluriannuel d’un fournisseur clé, ou encore le contrat de non concurrence. Mais la licence de débit de boisson pour un bar, un restaurant et un hôtel ou le droit de terrasse n’en font pas partie car ils sont accordés à titre individuel et non pour le compte du fonds de commerce.
Comment calculer la valeur d’un fonds de commerce ?
Cette liste à la Prévert varie selon les entreprises qu’il s’agisse d’un commerce, d’une usine, d’une société de services aux entreprises ou aux particuliers, ou d’un agent immobilier par exemple. Elle est pour autant importante au moment de la vente. L’estimation du prix du fonds de commerce va reposer sur la valeur vénale des actifs mais aussi sur le chiffre d’affaires généré et surtout l’excédent brut d’exploitation (ou EBE). Cette valeur vénale, c’est-à-dire le prix à la revente, va surtout s’appliquer aux actifs corporels en tenant compte de leur prix d’achat, leur coefficient d’amortissement, et leur obsolescence. Il faut savoir que le prix d’achat initial ne peut s’appliquer, il y aura forcément une dépréciation.
La valeur des actifs incorporels répond beaucoup moins à cette logique comptable. Par exemple, une entreprise située dans une rue très passante pourra obtenir un prix plus élevé que celle implantée dans une rue isolée du centre-ville. Autre illustration : les salariés. Si l’équipe est très jeune, l’acheteur a moins à se soucier des possibles départs en retraite à venir. Ce n’est pas le cas, s’il y a du personnel senior. Là, il lui faut vérifier qu’il existe une provision pour financer les indemnités de départ à la retraite. Si c’est le cas, aucune incidence particulière sur le prix. Dans la situation contraire, le montant à provisionner peut venir en déduction du prix de vente estimé.
Toutefois, l’administration fiscale dispose d’un barème indicatif : la moyenne des trois derniers chiffres d’affaires multipliée par 30%, 40% ou 50%, selon la nature de l’activité. Dans les faits, il y a un panachage de la valorisation par le chiffre d’affaires et la valorisation par la rentabilité. Cette dernière consiste à prendre un multiple de l’EBE, ou du résultat d’exploitation, allant de 6 à 8 selon les situations. On y ajoute la trésorerie nette et l’évaluation du montant des actifs corporels.
La vente du fonds de commerce
La cession d’un fonds de commerce ne consiste pas à céder les titres de la société. Et c’est avantageux pour une raison simple : la vente ne porte que sur les actifs nécessaires à l’exploitation des activités. Autrement dit, le repreneur ne récupère pas le passé de l’entreprise. En cas d’erreur de gestion, c’est le vendeur qui est responsable de ses actes pour la période allant jusqu’au moment de la conclusion de la vente. Ce n’est qu’après que l’acheteur engage sa responsabilité.
La vente s’opère dans un cadre juridique très réglementé. Ainsi, il faut regarder de près le droit au bail. Celui est une partie constitutive des éléments cédés. Cependant, il peut exister des clauses particulières comme celle nécessitant l’accord du propriétaire-bailleur sur le nom de repreneur (sans que cela puisse empêcher la cession du fonds de commerce), ou bien celle consistant à définir le type d’activité acceptée. Surtout, il peut être prévu le versement d’un pas-de-porte, c’est-à-dire une sorte de redevance de mise à disposition des locaux. En revanche, concernant le montant du loyer, il n’y aura pas de mauvaise surprise. Celui-ci restera dans des niveaux similaires à au montant constaté au moment de la vente. En effet, il est encadré. Son montant ne peut augmenter au-delà de l’évolution de l’indice des loyers commerciaux..
De même, s’il y a un changement d’activité, outre la nécessité d’un éventuel accord de la copropriété, la mairie dispose d’un droit de préemption (jusqu’à deux mois après l’information de l’institution), si le fonds est situé dans une zone de sauvegarde des commerces et de l’artisanat de proximité. Il est peu utilisé mais il existe. Il consiste à permettre à la collectivité d’acheter le fonds de commerce au prix du marché et de le rétrocéder à une autre personne ou à le gérer elle-même, afin d’y maintenir une activité répondant aux critères de la zone définie.
Le formalisme d’une vente de fonds de commerce
Ce qu’il faut retenir c’est que vendeur comme acheteur doivent respecter une procédure très balisée concernant la vente. D’abord, tout doit commencer par l’information des salariés. Ceci doit être fait, au plus tard, deux mois avant la conclusion de la transaction. Mais l’opération, sous condition, peut se dénouer dans un délai allant jusqu’à deux ans. Cette règle ne s’applique pas pour les entreprises d’au-moins 250 salariés ou dans le cadre d’une opération de transmission ou succession, notamment.
Puis, au moment de la signature de la vente, acheteur et vendeur doivent vérifier que le document précise le prix de vente du fonds, celui des éléments incorporels, celui des marchandises et du matériel, le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition, l’état des privilèges et nantissements mais aussi les résultats d’exploitation, les chiffres d’affaires mensuels entre la clôture du dernier exercice et le mois précédant la vente. Enfin, les éléments du bail doivent être précisés : date de signature, durée, noms et adresses du bailleur et du cédant. L’absence d’un ou plusieurs de ces éléments entraîne la nullité de la vente.
Ensuite, lorsque la vente est conclue, une course contre la montre commence. L’acquéreur dispose d’un délai maximum de 15 jours pour publier l’opération dans un journal d’annonces légales. Lorsque l’information est diffusée, il doit sous trois jours contacter le Greffe du tribunal de commerce pour publier un avis dans le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC). Les éventuels créanciers bénéficient alors d’un délai de 10 jours pour s’opposer. Au-delà, aucune requête n’est recevable.
Pour finir, après cette double publicité obligatoire, le nouveau propriétaire du fonds de commerce doit prendre contact avec la Direction générale des finances publiques (DGFiP) pour y faire enregistrer l’acte de cession du fonds. Une dernière démarche à ne pas négliger car il y a des droits de mutation à régler. En cas d’oubli, il y a un risque de redressement fiscal. Notez que si le montant est réglé par l’acheteur, une prise en charge par le vendeur peut être prévue dans l’acte de vente.
La fiscalité associée à un fonds de commerce
Sur le plan fiscal, la cession d’un fonds de commerce est peu taxée. Si le vendeur exerce une activité commerciale, artisanale, libérale ou agricole, en tant qu’entreprise individuelle pendant au moins 5 ans, sa plus-value (l’écart entre le prix de vente et le prix d’origine) est totalement exonérée si les recettes annuelles ne dépassent pas 90 000 euros et sont déclarées comme bénéfice non commercial (BNC). Au-delà, et jusqu’à 126 000 euros, l’exonération est partielle. Pour une activité de vente ou d’hébergement, l’exonération totale s’applique jusqu’à 250 000 euros de recettes annuelles et partiellement jusqu’à 350 000 euros. C’est le même plafond pour les activités agricoles. Dans les autres cas, le montant de la vente entre dans les actifs de la société, permettant ainsi de régler les éventuelles créances et d’investir dans d’autres projets. Ici, les gains ne sont pas directement soumis à l’impôt sur les sociétés. Ils peuvent l’être en cas de bénéfice imposable.
Reste la question de la TVA. La vente est soumise à la TVA sauf dans le cas d’une cession intégrale du fonds de commerce et quand l’acquéreur lui-même est assujetti à cette taxe. En ce cas, l’exonération porte non seulement sur le montant des éléments du fonds de commerce mais aussi les différentes prestations payées dans la cadre de la vente : conseil, audit, expertise… Quant au cédant, dans la mesure où il est redevable de la reverser, il doit, sous 30 jours après la publication légale de la vente, avertir l’administration fiscale. Sous condition, le délai peut être étendu à 60 jours.