Immobilier d’entreprise : 2025, l’année de la stabilisation sélective

Immobilier d’entreprise : 2025, l’année de la stabilisation sélective
immobilier d'entreprise 2025

Sommaire

Après deux exercices de repli, 2025 marque un retour progressif de la liquidité sur le marché français de l’immobilier d’entreprise. Les investisseurs reviennent, mais de manière ciblée : les transactions se concentrent sur les actifs bien situés, à fort potentiel de création de valeur, et sur les immeubles rénovés répondant aux nouveaux standards ESG. Cette reprise, encore inégale, se lit dans les chiffres publiés par ImmoStat, JLL, CBRE et BNP Paribas Real Estate : 2025 est bien une année de stabilisation, mais à plusieurs vitesses.

Volumes d’investissement : un marché en reprise maîtrisée

Selon ImmoStat, le volume d’investissement en France a atteint 6,8 milliards d’euros au 1er semestre 2025, en hausse de +11 % sur un an. Au 3e trimestre, 2,7 milliards d’euros supplémentaires ont été investis (–27 % vs T3 2024), portant le cumul annuel à 8,7 milliards (+7 % sur un an). En Île-de-France, le rebond est plus marqué : 1,6 milliard d’euros investis au T3 (+12 %), tiré par le retour de grandes transactions et la réouverture de certaines poches de financement bancaire.

BNP Paribas Real Estate note que si le marché reste en dessous des moyennes historiques (autour de 10 milliards par semestre sur cinq ans), la courbe s’est clairement inversée depuis le début de l’année. Les investisseurs français, désormais majoritaires, dominent les transactions mid-cap, tandis que les institutionnels internationaux reviennent prudemment sur le segment “core plus”.

Bureaux : reprise sélective, mais premiers signes de tension dans le QCA

Les bureaux demeurent la première classe d’actifs sur le marché de l’investissement en 2025, représentant environ 2,1 milliards € investis au premier semestre, soit près de 40 % des volumes totaux selon BNP Paribas Real Estate et ImmoStat.

Le redémarrage reste concentré sur Paris intra-muros, en particulier le Quartier Central des Affaires (QCA), où les rendements prime se stabilisent autour de 4,0 %. Mais depuis quelques mois, des signaux de tension apparaissent : l’offre immédiatement disponible dans le QCA a augmenté de près de 80 % en un an, pour un taux de vacance estimé autour de 5 % fin 2025 (contre 2,4 % fin 2023). Cette évolution s’explique par la livraison d’immeubles restructurés et un ralentissement des grandes prises à bail (> 5 000 m²).

Les loyers prime ont atteint un nouveau pic d’environ 1 200 €/m²/an, soit une hausse annuelle de +18 %. Ce niveau devient un frein pour certains utilisateurs, dans un contexte économique plus incertain et de recherche d’optimisation des surfaces. Les mesures d’accompagnement (franchises, participation aux aménagements, flexibilité contractuelle) se sont également renforcées, y compris dans les zones les plus centrales, signe d’une négociation plus équilibrée entre bailleurs et preneurs.

Côté utilisateurs, le marché francilien reste actif mais évolue vers des surfaces plus petites et mieux localisées. JLL recense 132 transactions au S1 2025, représentant 79 000 m², dont 64 % à Paris. L’offre immédiate à la vente s’élève à 535 000 m² (+15 % vs fin 2024), dont 75 % de surfaces inférieures à 1 000 m², illustrant un recentrage marqué vers des bureaux flexibles, qualitatifs et performants sur le plan énergétique.

Logistique et activités : normalisation locative, résistance de l’investissement

Après deux années de surperformance (2021–2022) portées par l’e-commerce et la reconstitution des stocks, le marché locatif logistique s’est stabilisé. D’après JLL, la demande placée au 1er semestre 2025 s’établit à 1,5 million m², soit –17 % par rapport à 2024 et à la moyenne des cinq dernières années. Les délais de décision des utilisateurs s’allongent, mais les fondamentaux locatifs restent solides : taux de vacance inférieur à 4 %, et loyers prime en progression dans les grands hubs (Lille, Lyon, Orléans).

Sur le plan investissement, la logistique confirme sa résilience. Selon CBRE, les volumes investis dans l’immobilier industriel et logistique atteignent 1,7 milliard € au S1 2025 (+3 % sur un an). EOL relève également une progression de +17 % des transactions sur les entrepôts de plus de 10 000 m² (soit environ 1,4 milliard €), preuve que les investisseurs restent attirés par les actifs modernes, sécurisés par des baux longs et des locataires solides. Les rendements prime se sont stabilisés autour de 4,75 % – 5,00 %, maintenant une prime de risque attractive par rapport aux bureaux.

Commerces : le grand retour des flux

Longtemps délaissé, le commerce opère en 2025 un véritable retour en grâce. Les volumes investis atteignent 1,8 milliard € au S1 2025 (+64 % selon CBRE), un niveau en ligne avec la moyenne des cinq dernières années. Les investisseurs privilégient les formats défensifs : retail parks alimentaires, pieds d’immeubles prime ou retail expérientiel dans les centres-villes dynamiques.

Le capital domestique domine les transactions, tandis que les grands fonds se repositionnent sur les actifs “core plus”. Le marché reste toutefois contrasté : les centres commerciaux régionaux demeurent sous pression, alors que les actifs de proximité, à flux réguliers, tirent leur épingle du jeu.

Hôtellerie et alternatifs : retour de la confiance

Le secteur hôtelier poursuit sa reprise, soutenu par une fréquentation touristique record en 2025 et une montée en gamme des actifs gérés. Les investisseurs recherchent les produits “core plus” dans les grandes métropoles et les destinations touristiques. Les classes d’actifs alternatives (santé, éducation, data centers, loisirs) continuent d’attirer les capitaux, même si la sélection des opérateurs et la solidité des baux restent déterminantes.

Tendances structurelles

1. Stabilisation des valeurs prime

Le re-pricing entamé en 2023-2024 semble achevé pour les actifs prime : les décotes se resserrent, et la demande revient sur les immeubles de qualité. Les actifs secondaires, en revanche, nécessitent toujours des ajustements importants.

2. Transition ESG

La conformité au Décret Tertiaire, à la taxonomie européenne et aux labels énergétiques devient un préalable à tout financement. Les projets de rénovation ou de réversibilité gagnent en attractivité.

3. Financement sélectif mais en voie de normalisation

La détente monétaire amorcée par la BCE facilite légèrement l’accès au crédit, mais les marges bancaires demeurent élevées. Depuis quelques mois, les taux courts et longs se stabilisent avec un Euribor 3 mois aux alentours de 2 % et un taux swap 15 ans aux alentours de 2,8 %. Malgré l’instabilité politique et l’alerte sur la dette française, l’OAT 10 ans se maintient et oscille entre 3,3 % et 3,5 %. Nous restons vigilants sur les taux longs qui pourraient potentiellement augmenter en cas de crise majeure, et il nous paraît parfois un peu optimiste de parier sur une compression des taux de capitalisation à court terme dans les business plans.

4. Diversification des allocations

Les investisseurs recherchent des classes d’actifs moins corrélées aux cycles : résidentiel en bloc, immobilier de santé, logistique urbaine. Les marchés régionaux à haut rendement (Nantes, Lille, Toulouse) gagnent en intérêt.