Un capital souvent important mais moins de revenus
Bien que le dirigeant puisse percevoir une somme d’argent non négligeable lors de la cession partielle ou totale de son entreprise, ses revenus professionnels peuvent considérablement diminuer voire disparaitre. Plusieurs cas sont possibles :
- Vente totale de la société avec une période de quelques mois ou années de transition pendant laquelle le dirigeant reste dans l’entreprise
- Vente totale de la société avec un départ quasiment immédiat du cédant (plus rare)
- Vente totale de la société mais avec un dirigeant souhaitant rester à son poste
- Vente partielle de la société
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Dans tous ces cas, le banquier devra appréhender les nouveaux revenus du dirigeant afin de calculer sa capacité à rembourser périodiquement son crédit avec des revenus stables sans prendre en compte les revenus exceptionnels issus de la vente de la société. Depuis 2022, le taux d’endettement maximum de 35 % a été légiféré. Soit l’emprunteur peut adapter son apport pour rester dans le cadre des 35 %, soit il faudra négocier avec un banquier qui acceptera de déroger à la règle tel que prévu par la loi (attention ces dérogations sont également encadrées, dérogation dans 20 % des cas sous certaines conditions).
Le crédit in fine, une solution pour diminuer le taux d’effort ?
Bien qu’il soit beaucoup plus onéreux, de nombreux entrepreneurs cédants souhaitent avoir recours au prêt in fine afin de réduire le taux d’effort et donc leur taux d’endettement vis-à-vis du banquier.
Au lieu de rembourser du capital tous les mois en plus des intérêts, le prêt in fine consiste à payer uniquement des intérêts. Malheureusement, bien que les échéances périodiques soient beaucoup plus faibles, cette solution n’est pas de nature à faire baisser le taux d’endettement. Afin de calculer le taux d’endettement, dans le cas du crédit in fine, la banque doit prendre en compte l’échéance la plus importante du crédit, à savoir la dernière échéance consistant au remboursement intégral du prêt.
Dans ce cas, très peu de personnes, pour ne pas dire aucune, ne peuvent rester dans le cadre du 35 % de taux d’endettement. Bien que le prêt in fine puisse permettre à l’emprunteur d’alléger ses mensualités le temps de percevoir une autre somme d’argent (issue de la vente d’une autre partie du capital de la société) pour solder le prêt in fine avant la fin du prêt, il ne permet pas de résoudre le problème du taux d’endettement. Bien souvent, il faudra demander une dérogation.
De plus, dans le cadre d’un prêt in fine de nombreuses banques demandent le placement d’une somme d’argent nantie comprise entre 30 % et 100 % du montant du prêt. Cela peut fortement limiter l’intérêt du prêt pour certains.
Dans ce type de dossier, il arrive souvent que les banques proposent une partie du prêt in fine et l’autre amortissable (50/50, 30/70…). Au-delà de l’effort de trésorerie pour le client et de la garantie complémentaire pour le banquier, cela permet également à la banque de capter de l’épargne et de fidéliser son client.
Emprunter via sa société holding ou autre société
Dans le cadre de la cession de sa société, le dirigeant en profite parfois pour organiser son patrimoine différemment et détenir une partie de son capital à travers la holding détenant les actions de la société vendue partiellement ou totalement. Au-delà des différentes astuces fiscales qui ne font pas l’objet de cet article, le dirigeant réinvestit parfois une partie du produit de la vente de sa société dans l’immobilier via cette holding. Bien souvent cette holding détient partiellement ou totalement une ou plusieurs SCI qui procéderont à l’acquisition du bien immobilier. Dans ce cas, les fonds nécessaires à l’acquisition immobilière sont apportés par la holding à la SCI en compte courant d’associés et la SCI peut emprunter le montant restant nécessaire à l’acquisition auprès d’une banque. Il n’est plus question de taux d’endettement maximum de 35 % puisque le prêt octroyé sera un prêt professionnel.
L’inconvénient étant qu’il est souvent plus cher et qu’il est plus compliqué (mais pas toujours impossible) d’obtenir un prêt sur une durée supérieure à 15 ans.
L’acquisition d’une résidence principale avec ce genre de schéma peut s’avérer moins intéressante pour l’acquéreur qui préfère détenir son logement en propre et plus compliqué à financer. En effet, dans le cadre d’un prêt professionnel, la banque souhaite souvent que le projet permette de dégager une couverture locative d’au moins 100%, c’est-à-dire que les revenus locatifs doivent couvrir au moins 100 % de l’échéance du crédit.
Vendre sa société et changer de vie… attention au statut de non-résident
Partir vivre une vie de surfer au Costa Rica, de skieur au Canada ou une nouvelle vie d’entrepreneur au Moyen-Orient… Certains pourraient être tentés de complètement changer de vie suite à la vente de leur société. Attention, dans ce cas un investissement immobilier en France en tant que non-résident avec une situation professionnelle atypique rendra le projet et l’obtention d’un crédit immobilier encore plus compliqué. Certaines banques privées peuvent parfois vous accompagner mais les critères d’octroi sont souvent beaucoup plus stricts :
- Presque exclusivement de l’immobilier résidentiel
- Plus d’apport, souvent au moins 30 % d’apport
- Des taux plus élevés, souvent entre + 0,3 et + 0,5 %
- Des durées de crédit parfois plus courtes
- Certains pays sont exclus des politiques crédit
- Certains pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni rendent la vente de produits financiers plus compliqués voire impossible
- Une entrée en relation commerciale moins intéressante pour le banquier
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Vendre sa société et revenir en France… entre crédit immobilier résident et non-résident
Nous sommes souvent bien critiques à l’égard de notre pays mais nous constatons que de nombreux entrepreneurs ayant fait fortune à l’étranger souhaitent revenir dans leur pays. Attention, dans ce cas l’obtention d’un crédit immobilier n’est pas toujours évidente également. Si vous êtes du genre à anticiper votre retour et à chercher à acquérir votre résidence principale en France alors que vous vivez encore à l’étranger, vous serez bien souvent traité comme un non-résident par les banques. Ce n’est pas rédhibitoire mais il faudra également bien anticiper le crédit pour vous assurer du montant qu’il serait envisageable d’emprunter. Si vous décidez de rentrer en vous installant en location pour vous laisser le temps de chercher votre résidence principale, bien que vous ne soyez plus non-résident la documentation sera un peu plus compliquée à présenter (avis d’imposition, langue des documents…). Vous l’aurez compris, dans tous les cas, il faudra bien anticiper le retour au pays qui revêt quelques contraintes administratives. Cependant, contrairement à certains pays dont les banques ferment la porte aux non-résidents ou aux emprunteurs qui n’ont pas de « credit check », vous pouvez emprunter en tant que non-résident en France. Cela sera plus difficile mais possible.
