Si les prêts LBO se positionnent comme des instruments financiers majeurs et incontournables dans les opérations d’acquisition, ils se trouvent actuellement au cœur d’un bras de fer entre les institutions financières et les banques. La BCE et la Banque d’Angleterre mettent en effet la pression sur les établissements bancaires afin qu’ils renforcent leur surveillance. Ils entendent par ailleurs leur imposer un niveau supérieur d’exigences.
Expansion du Prêt LBO et Contexte Réglementaire
Les prêts LBO permettent aux investisseurs d’acquérir des entreprises en utilisant une proportion significative de dette, souvent garantie par les actifs de l’entreprise cible. Cette pratique comporte des risques, surtout en période d’incertitude voire de volatilité économique.
En 2023, le marché européen des prêts LBO a connu une croissance rapide, doublant les volumes de crédits par rapport à l’année précédente pour atteindre 204 milliards d’euros en août 2023. À la fin du premier trimestre 2024, les encours de ces prêts s’élevaient à près de 468 milliards d’euros, suscitant des préoccupations parmi les régulateurs.
Cette expansion rapide suscite dorénavant des inquiétudes parmi les régulateurs. La BCE, en particulier, a exprimé des préoccupations quant à l’importante exposition des banques face à ces prêts risqués. Des institutions majeures telles que BNP Paribas, Société Générale et Deutsche Bank se trouvent désormais sous surveillance de la part de l’institution européenne. Tom Dechaene, membre du Conseil de surveillance de la BCE, a déclaré : « Nous devons examiner les prêts à effet de levier, mais nous devons conduire cet examen de manière sophistiquée. »
Renforcement des Exigences de Fonds Propres
Face à ces risques, la BCE envisage d’imposer aux banques des réserves supplémentaires pouvant aller jusqu’à 13 milliards d’euros pour couvrir les risques de défaut liés aux prêts LBO. Toutefois, ce chiffre pourrait être revu à la baisse, à environ 7 milliards d’euros, car la BCE continue d’évaluer la situation.
De leur côté, les banques contestent certaines méthodes d’évaluation employées par la BCE. Elles arguent que les équipes externes qui mènent les examens ne bénéficient pas d’une compréhension approfondie de leurs processus internes. Elles reprochent également à la BCE de classer certains prêts comme proches du défaut, alors que les entreprises concernées continuent pourtant de rembourser leurs dettes.
Position de la Banque d’Angleterre
La Banque d’Angleterre partage les préoccupations de la BCE concernant les prêts à effet de levier. En juin 2024, elle a mis en garde contre l’essor du “NAV financing”, un mécanisme permettant aux fonds de private equity d’obtenir des prêts en s’appuyant sur la valeur nette de leurs portefeuilles. Ce type de financement, en plein essor, représente un marché mondial de plus de 100 milliards de dollars.
Cas de l’Acquisition de X (anciennement Twitter)
Un exemple qui illustre les récentes polémiques autour des prêts LBO ? Le financement de 13 milliards de dollars pour l’acquisition du réseau social X – anciennement Twitter – par Elon Musk. BNP Paribas et Société Générale ont participé à ce financement. Avec toutefois un hic qui pourrait devenir un problème : leur participation devient un fardeau financier en raison de la difficulté à la revendre.
La montée des taux d’intérêt accroît par ailleurs le coût en capital pour les banques, avec des pertes potentielles estimées à 4 milliards de dollars pour l’ensemble des institutions concernées. Société Générale a récemment réduit son exposition à ce prêt de plus de moitié, tandis que BNP Paribas demeure exposée à hauteur de 650 millions de dollars.
Quelles implications pour les professionnels de l’immobilier ?
Bien que les prêts LBO offrent des opportunités significatives, ils comportent des risques qui attirent l’attention des régulateurs. Si les mesures prises par la BCE et la Banque d’Angleterre entendent assurer la stabilité financière, elles pourraient également modifier les dynamiques du marché du financement à effet de levier.
Les investisseurs immobiliers professionnels doivent rester vigilants quant aux évolutions réglementaires et aux conditions de marché. Une compréhension approfondie des mécanismes de financement et une évaluation rigoureuse des risques seront essentielles pour naviguer dans cet environnement en mutation.
Les développements en cours pourraient avoir à termes plusieurs répercussions :
- Resserrement des conditions de prêt : L’accès au financement à effet de levier pourrait devenir plus difficile.
- Augmentation des taux d’intérêt des prêts LBO : Les banques pourraient augmenter les taux pour compenser les réserves supplémentaires, augmentant ainsi le coût du capital pour les investisseurs.
- Surveillance accrue : Les investisseurs devront renforcer leur analyse des risques pour répondre aux attentes des régulateurs.